L’Observatoire naval américain 1940-45
Extrait du Manuel du gouvernement des États-Unis, Division des enquêtes publiques, Office of War Information (Bureau d’information sur la guerre), 1945
Observatoire naval. — L’Observatoire naval de Washington D.C. diffuse des signaux horaires quotidiennement. En plus d’établir l’heure standard pour l’ensemble du pays et pour les navigateurs en mer afin de déterminer d’éventuelles erreurs de chronométrage et leur position, ces signaux sont utilisés par les géomètres, ingénieurs, travailleurs scientifiques ainsi que les ingénieurs des mines et du pétrole pour la détermination de la position, la mesure de la gravité et des fréquences radio et à d’autres fins requérant une heure exacte. Dans le but de répondre aux besoins de tous ceux qui pourraient en avoir l’utilité, un certain nombre de fréquences différentes sont utilisées pour la diffusion des signaux via la station radio navale d’Annapolis (Maryland). Des signaux quotidiens sont également émis par la station de Mare Island (Californie) et les signaux de midi sont transmis via télégraphe. Les stations radio navales d’Honolulu et celles de la zone du Canal de Panama transmettent des signaux horaires basés sur l’heure à l’Observatoire naval.
La gestion de l’entretien, des réparations, de l’inspection, de la fourniture et de la distribution des instruments de navigation, aéronautiques et aérologiques désignés et de leurs pièces de rechange pour les navires et les aéronefs de la marine est prise en charge au niveau de l’Observatoire naval.
L’Observatoire naval assure une observation continue de la position absolue des étoiles fondamentales et détermine de manière indépendante, par l’intermédiaire d’une observation du soleil, la position de l’écliptique et de l’équateur parmi les étoiles, ainsi que la position des étoiles, de la lune et des planètes, par rapport à l’équateur et aux équinoxes, afin d’obtenir des données à utiliser dans la préparation des éphémérides américaines et l’almanach nautique, mais aussi pour améliorer les tables astronomiques des planètes, de la Lune et des étoiles. Des informations sont également fournies à certains pays étrangers conformément à des accords internationaux.
Le Bureau de l’Almanach Nautique de l’Observatoire Naval calcule et prépare la publication des éphémérides américaines et de ses suppléments, l’ « American Air Almanac » (Almanach de l’aviation américaine) et le « Nautical Almanac » (Almanach nautique). En outre, des travaux de recherches essentiels consistant à exploiter des valeurs optimisées des éléments astronomiques fondamentaux sont entrepris en vue de les intégrer dans de nouvelles tables des mouvements célestes.
Parmi les nombreuses tâches scientifiques qui incombent à l’Observatoire naval, il y a également le partage des informations relatives aux éclipses solaires et lunaires. D’ailleurs, il est d’usage, depuis de nombreuses années déjà, de distribuer des brochures rassemblant toutes les données astronomiques relatives aux prochaines éclipses solaires totales.
Wallace Eckert, professeur d’astronomie à l’université de Columbia, est l’astronome en chef de l’USNO, mais également directeur du bureau de l’almanach nautique de l’USNO à partir de 1940. Il a gardé ce poste jusqu’en 1945, date à laquelle il est revenu à Columbia pour créer le laboratoire de calcul scientifique Watson.
La guerre avait alors déjà éclaté en Europe, et il était urgent de produire des almanachs qui soient à la fois précis et exploitables aussi bien pour la navigation maritime qu’aérienne (surtout aérienne). Lorsqu’Eckert a intégré l’USNO au début des années 1940, « ils ne disposaient pas d’équipements automatiques. Chaque chiffre était écrit à la main, puis lu et écrit encore et encore… Ils n’avaient pas de machine qui permettrait d’imprimer les chiffres automatiquement. Ils utilisaient des calculatrices de bureau ». [9].
L’almanach nautique n’était produit qu’une seule fois par an et le personnel en place pouvait garder le rythme grâce à des méthodes éprouvées. Les almanachs de l’aviation constituaient une toute autre paire de manches. Bien qu’il y en ait eu plusieurs qui ont été produits durant les années 1930 aux États-Unis, en Grande-Bretagne et ailleurs, une publication régulière était désormais nécessaire, notamment trois fois par an. Ces almanachs devaient être indépendants des données provenant d’autres pays et adaptés à une utilisation au combat : ils doivent être compacts, lisibles, « user-friendly » et exempts d’erreurs. Les expériences passées d’Eckert dans le domaine de la mécanique céleste et du calcul scientifique automatisé – combinées à sa légendaire ingéniosité – faisaient de lui l’homme parfait pour cette mission.
Eckert a rapidement doté le bureau de l’Almanach Nautique de machines à cartes perforées IBM (une tabulatrice 405, un multiplicateur 601 à poinçon, ainsi que divers trieurs, des summary punches (pour les résumés) etc.) et avait recruté des personnes qui pourraient en bénéficier. En quelques mois, il avait automatisé le processus de création des tables, calculant tous les chiffres à la machine plutôt qu’à la main et publia les almanachs de l’aviation et les almanachs nautiques au titre de 1941 avant que l’année 1940 ne s’achève. L’année suivante, il commença à imprimer directement les tableaux, plutôt que de le faire manuellement, éliminant ainsi la dernière cause possible d’erreurs de transcription. Il institua en même temps une procédure de vérification à la fois ingénieuse et stricte. Eckert est à l’origine de tous les almanachs du temps de guerre ; certaines éditions ayant été éditées à près de 200 000 exemplaires et pas une seule erreur n’a jamais été signalée.
Les méthodes d’Eckert basées sur des machines ont été adoptées par Paul Herget, un astronome de l’université de Cincinnati faisant partie de son équipe, pour produire des éphémérides américaines ainsi que l’almanach nautique à partir de 1940. Herget a également mis à profit les machines d’Eckert pour les équipes de nuit chargées de la création de tables utilisées pour localiser des sous-marins allemands cachés via un système de triangulation des signaux radio. Cela a permis, lors de leur publication en 1943, de réduire les pertes de navires alliés dans l’Atlantique de 30 à 6 %. Les almanachs de l’USNO ainsi que d’autres productions de machines ont été des facteurs décisifs dans la victoire des Alliés durant la Seconde Guerre mondiale.
Original: http://www.columbia.edu/cu/computinghistory/navalobservatory.html
Traduit par: https://casinofiables.com/